ames scrupuleuses, vies d'angoisse, tristes obsédés. vol. 1. obsessions et contrainte intérieure de l'antiquité à freud

Résumé

âmes scrupuleuses, vies d'angoisse, tristes obsédés I. obsessions et contrainte intérieure de l'antiquité à freud Obsessions et compulsions comptent parmi les phénomènes les plus étranges de la vie mentale. Ne pas pouvoir s'empêcher de penser à ce qui nous fait moralement horreur, baigner dans une atmosphère étouffante d'angoisse et de culpabilité, craindre à chaque instant de commettre un crime affreux, vérifier tout cent fois, se perdre en rituels conjuratoires tout en sachant qu'ils sont ridicules, comment cela a-t-il pu affliger tant d'êtres humains, en des temps et des lieux si divers ?Loin d'y voir un invariant de la nature humaine ou un trouble du cerveau qui change de visage selon les époques, Pierre-Henri Castel soutient une thèse provocatrice : si tous les hommes se heurtent, en agissant, à certains embarras, notre civilisation a été la seule à élever doutes, scrupules, hésitations et remords au statut d'épreuves de vérité. Triompher de ces embarras après les avoir longuement endurés est même devenu la pierre de touche de l'affirmation de l'individu en tant que sujet authentiquement conscient et responsable. Obsessions et sentiments de contrainte intérieure livrent ainsi la clé du douloureux processus de formation de la conscience morale en Occident. Elles en sont la face sombre mais inévitable d'excès et de folie - ou la conscience, mais comme maladie.L'ascétisme des Pères du Désert, Augustin, les scrupuleuses du Grand Siècle, la mélancolie des puritains, puis Kierkegaard, scandent un parcours qui débouche, d'Esquirol à Janet, sur la médicalisation de l'angoisse et sur l'émergence de la figure folle de l'obsédé. Les embarras de l'agir cristallisent enfin chez Freud sous la forme singulière de la « névrose obsessionnelle ». Pierre-Henri Castel entame ici une vaste fresque où l'histoire de la psychiatrie, la philosophie, l'anthropologie sociale et la psychanalyse illuminent un aspect négligé de notre condition d'individus, mais aussi le prix psychique dont nous la payons encore.